mardi 23 septembre 2008

notre vocation - textes du jour

Mardi 23 Septembre 2008

Sainte Thérèse de l'Enfant Jésus (1873-1897), carmélite, docteur de l'Église Derniers Entretiens, 21/08/1897 (OC, Cerf DDB 1996, p.1102)

Elle vivait de foi comme nous Que j'aurais bien voulu être prêtre pour prêcher sur la Sainte Vierge ! Une seule fois m'aurait suffi pour dire tout ce que je pense à ce sujet. J'aurais d'abord fait comprendre à quel point on connaît peu sa vie. Il ne faudrait pas dire des choses invraisemblables ou qu'on ne sait pas ; par exemple que, toute petite, à trois ans, la Sainte Vierge est allée au Temple s'offrir à Dieu avec des sentiments brûlants d'amour et tout à fait extraordinaires ; tandis qu'elle y est peut-être allée tout simplement pour obéir à ses parents... Pour qu'un sermon sur la Sainte Vierge me plaise et me fasse du bien, il faut que je voie sa vie réelle, pas sa vie supposée ; et je suis sûre que sa vie réelle devait être toute simple. On la montre inabordable, il faudrait la montrer imitable, faire ressortir ses vertus, dire qu'elle vivait de foi comme nous, en donner des preuves par l'Evangile où nous lisons : « Ils ne comprirent pas ce qu'il leur disait » (Lc 2,50). Et cette autre, non moins mystérieuse : « Ses parents étaient dans l'admiration de ce qu'on disait de lui » (Lc 2,33). Cette admiration suppose un certain étonnement, ne trouvez-vous pas ? On sait bien que la Sainte Vierge est la Reine du Ciel et de la terre, mais elle est plus mère que reine, et il ne faut pas dire à cause de ses prérogatives qu'elle éclipse la gloire de tous les saints, comme le soleil à son lever fait disparaître les étoiles. Mon Dieu ! que cela est étrange ! Une mère qui fait disparaître la gloire de ses enfants ! Moi je pense tout le contraire, je crois qu'elle augmentera de beaucoup la splendeur des élus. C'est bien de parler de ses prérogatives, mais il ne faut pas dire que cela... Qui sait si quelque âme n'irait pas même jusqu'à sentir alors un certain éloignement pour une créature tellement supérieure et ne se dirait pas : « Si c'est cela, autant aller briller comme on pourra dans un petit coin ». Ce que la Sainte Vierge a de plus que nous, c'est qu'elle ne pouvait pas pécher, qu'elle était exempte de la tache originelle, mais d'autre part, elle a eu bien moins de chance que nous, puisqu'elle n'a pas eu de Sainte Vierge à aimer, et c'est une telle douceur de plus pour nous.

Prier… le texte de Thérèse de Lisieux, magnifique, puissant et étonnant, car il surpasse la plupart des apologies de clercs professionnels. L’amour inspire pas seulement la poésie ou le désir. Il est au cœur du sujet, dans la forme et dans le fond. C’est splendide, comme – avant-hier – devant l’océan bordant tranquillement la grande baie qui nous est familière à tous trois, les pages de Christiane Singer [1]sur son lit de mort, l’expérience de la vie et de sa force par la perspective de la mort, quotidiennement et jusqu’à ce que l’expérience soit complète, alors… le Seigneur dipose du cœur du roi comme on règle un canal d’irrigation, il le dirige où il veut. Nos sentiments, nos précarités, nos élans, ce jaillissement plus vrai que notre volonté et pourtant qui identifie notre liberté. Chacun trouve que sa conduite est droite, mais c’est le Seigneur qui pèse les cœurs. Ne pas nous juger nous-mêmes, ne pas nous évaluer, pas de bilan. Accomplir la justice et le droit, cela plaît au Seigneur plus que le sacrifice. Pas de rite ni de combinaisons cambistes et volontaristes, un comportement vrai. Les plans de l’homme actif lui assurent du profit, mais l’homme trop pressé est toujours perdant. ... L’homme simple acquiert la connaissance quand il voit instruire le sage. … Celui qui ferme ses oreilles à la clameur des pauvres criera lui-même sans obtenir de réponse. Cette sagesse anticipe l’Evangile, elle paraît naturelle à lire, mais elle conduit à un comportement et à une spiritualité : montre-moi la voie de tes préceptes, que je médite sur tes merveilles. Guide-moi sur la voie de tes volontés, là, je me plais. En retour, Dieu, son Fils incarné, nous adoptent, nous prennent, adhésion mutuelle : Ma mère et mes frères, ce sont ceux qui entendent la parole de Dieu, et qui la mettent en pratique. Or, la foule est immense et intense autour du Christ, cette multitude-là n’est pas préférée à mère et frères, c’est autre « chose », c’est la mise à égalité de valeur aux yeux de Dieu, quels que soient nos vocations, nos places et nos parcours, tout s’équivaut dans l’amour de Dieu pour chacun de nous : entendre et mettre en pratique, c’est être en Dieu, déjà, complètement. Montre-moi comment garder ta loi, que je l’observe de tout cœur. Demande du psalmiste, attente des Juifs à l’époque du Messie, nos balbutiements. Réponse, l’intimité du Seigneur [2].

[1] - Christiane Singer Derniers fragments d’un long voyage (Albin Michel . Avril 2007 . 136 pages)Oui, ma maladie ouvre des espaces inattendus pour beaucoup d’autres et tant pour mes plmus proches que pour les amis d’âme et de coeur. C’est incroyable. Une force semble se réveiller qui leur dit : désormais il n’y a plus à tergiverser ni à faire antichambre : il faut entrer en VIE, et sur l’instant !!! Tout ce que je rêvais se réalise ! J’étais en somme, si je peux le dire avec quelque humour, le dernier obstacle à ce rebondissement de conscience. L’intelligence de la vie me bouleverse, et son agilité paradoxale ! (p. 24) – Si je dois survivre de quelques mois ou de quelques années… et même de quelques décennies, sait-on jamais, je n’aurais pas vaincu la mort ; je l’aurai totalement, amoureusement intégrée. Voilà la vérité, elle est douce à dire (p. 25) – J’ai accompagné jusqu’au bout amer ma propre solitude, mon propre abandon. Il est bon et juste d’accompagner jusqu’au bout tout ce qu’on ressent, d’aller au plus aigu de la pointe. Pour être délivré de quelque chose, surtout le rejoindre de si près, de si près qu’on sente le souffle du dragon dans la nuque ! Oui seulement si je suis capable d‘accompagner ma misère, de l’admettre, de la reconnaître, elle prendra fin. (p. 125) – Dans l’ordre des choses humaines, les jeux sont faits. Un ordre restreint certes que « cet ordre des choses médicales », mais c’était pour moi un étrange soulagement. Je n’avais donc plus cette monstrueuse responsabilité de me maintenir en vie ! (p. 71) - Ma dernière prière : ne soyez pas déçus que la mort ait apparemment vaincu ; ce n’est que l’apparence, la vérité est que tout est VIE, je sors de la vie et j’entre en vie. Ah comme je serre dans mes bras tous ceux que j’ai eu le bonheur de rencontrer sur cette Terre ! (p. 72)

[2] - Proverbes XXI 1 à 13 ; psaume CXIX ; évangile selon saint Luc VIII 19 à 21

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