vendredi 6 janvier 2012


Hier

Deux rencontres en remontant du village. Très élégante mais sans ostentation ni recherche, combinaison vert amande ou chasselas, une bourse tressée en laine ocre, le visage avenant, la croisant, je la félicite, elle avoue quatre-vingt cinq ans et ne plus faire du ski aoprès avoir tant fait, ses enfants à en faire, des séjours en République dominicaine, une très jolie bru. Elle n’habite pas avenue Mozart à Paris, ou Neuilly. Son mari, décédé il y a quelques années seulement, dont elle prote le deuil encore : agent de maîtrise, électricien. J’ai admiré la classe nonobstant les origines probablement plus que modestes, mais signifiant cette aristicratie du travail qui fut tant pour la société à contre-courant de la montée en puissance politique et économique de la bourgeoisie. Ginette… A peine plus haut, silhouette fine, tout de noir, coiffure serrée par un bonnet noir également, le visage est ovale, régulier, pâle, mais le front est plissé, triste, le visage très triste. Sans préambule et ne m’arrêtant pas, nous nous croisons, je lui dis : vous avez tout en mains, ne doutez pas. Elle s’arrête, nous nous arrêtons, chaussée en courbe, très réduite par les bourellets de neige et les voitures recouvertes. Jamais depuis quarante-deux ans, je n’ai vécu aussi dur, aussi douloureux. Je lui dis, ce qui compte et nous marque le plus dans la vie, ce ne sont pas les ennuis d’argent, mais d’amour. Vous avez tout. Pas besoin de détailler de part et d’autre. Je généralise, notre pays est tombé où il est en oubliant l’affectif, l’amour, le couple, la famille, elle sourit, rebrousse chemin, remonte elle aussi et à dix mètres, entre dans un chalet, chez elle. Tout se devine. Pour penser à elle et… je lui demande son prénom : Marie-Hélène, toute prière, toute communion souhaite cette précision. Le visage dit tout sans doute, mais le prénom se transmet comme le premier don, puis la fondamentale reconnaissance : amour, société. Nous étions dans ce qu’elle vit. Prier… La messe que je croyais de l’Epiphanie. A l’église, en trinité, un chemin figuré par des pierres d’ici va de marche en marche jusqu’à un évangéliaire, à chaque degré, l’étape du Verbe, dit « la parole ». Notre fille lit… nous apprenons qu’en Italie, comme chez les orthodoxes, l’Epiphanie reste fêtée le 6 Janvier quel que soit le jour, qu’en Espagne, l’Ascension n’est pas célébrée le jeudi comme en France. Cette diversité dans l’Eglise « une » ne me plaît pas, mais réentendre l’épître de Jean après l’avoir méditée ce matin, me fait voir un argument décisif, le plus décisif de toute foi humaine : celui qui ne croit pas Dieu, celui-là fait de Dieu un menteur, puisqu’il ne croit pas au témoignage que Dieu rend à son Fils.
Sur la chaîne parlementaire, après des imitations extrêmement justes mais données sur le mode d’une souriante complicite (de SARKOZY à d’ORMESSON ou HALLIDAY, BELMONDO et RUQUIER), un document inattendu, très fouillé, fait défiler de très nombreux témoins publics dès les faits : d’un adjoint à la mairie de Nevers, à un journaliste ami, à un élu UMP médecin local, au procureur de la République d’alors au décisif patron des R.G. dans la Nièvre au moment de la mort de Pierre BEREGOVOY. C’est celui-ci qui déballe, révèle – était-ce déj dit, est-ce une re-diffusion ? – que dans la perspective d’une très difficile bataille pour le second tour de la présidentielle de 2002 entre JOSPIN et CHIRAC, d’éventuelles évidences que la thèse du suicide ne tient pas et a été ordonnée, pour cacher quoi … il avait été chargé par Yves BERTRAND, grand patron alors de tout le renseignement, de réenquêter. J’ai noté à mesure noms et arguments. J’ai peu à dire mais ma relation avec l’ancien Premier ministre a été si confiante, et partagée que rien ne m’est indifférent de ce qui le concerne et de ce qu’il a incarné : une gauche vraie et cohérente. Le 8 Avril 1992, c’est la déclaration de guerre, comme jamais avant et comme jamais depuis, à la corruption en politique. On tombe en pleine actualité de 2012. Exceptionnalité de Pierre BEREGOVOY, Premier Ministre, à ce point de vue dont témoigne un des plus hauts magistrats de la Cour de Cassation. Sans tristesse ni ironie : lucidité.

Ce matin

Publicité télévisée sur Ludo : détruis ton adversaire et tourbillonne vers la victoire, jeux « éducatifs » ou légende de la campagne présidentielle en cours. – Prier… [1] Jean l’évangéliste, seul des quatre, à rapporter le miracle de l’eau changé en vin à Cana pour sauver une réception de mariage, y rétablir l’ambiance, et à dire aussi le dialogue de Jésus avec la Samaritaine. L’eau… comme lors du baptême au Jourdain… mais au soir de la Cène, on ne boit que du vin. Un miracle que Jésus n’aurait pas accompli sans la remarque de sa mère ? un miracle très différent de la plupart de ceux que relatent les évangélistes, puisqu’il n’est pas accompli à la demande des bénéficiaires ni selon leur foi. Il ne s’agit pas non plus d’une guérison. Apparemment, un miracle hors normes messianiques, alors qu’il signifie toute la dialectique de la rédemption, symbolise par avance la vie de l’Eglise et rappelle combien les noces, le mariage, la fête, depuis les premiers livres de la Bible, anticipent la vie éternelle et disent l’amour de Dieu pour son peuple. Sa mère dit aux serviteurs : Faites tout ce qu’il vous dira… Jésus dit aux serviteurs : remplissez d’eau les cuves… Rien ne se fait sans les hommes (au sens du genre humain, femmes et hommes). Leçon de propagation de la foi… le maître du repas goûta l’eau changée en vin. Il ne savait pas d’où venait ce vin, mais les serviteurs le savaient, eux qui avaient puisé l’eau. … mais ne le disent pas. Constat : toi, tu as gardé le bon vin jusqu’à maintenant … les comportements qui ne s’expliquent plus quand Dieu n’est pas explicitement reconnu. Le Fils de Dieu est venu nous donner l’intelligence pour nous faire connaître Celui qui est vrai, et nous sommes en Celui qui est vrai, dans son Fils Jésus Christ. C’est lui qui est le Dieu vrai, et la vie éternelle. … Car le Seigneur aime son peuple, il donne aux humbles l’éclat de la victoire.[2]


[1] - 1ère lettre de Jean V 14 à 21 ; psaume CXLIX ; évangile selon saint Jean II 1 à 11

[2] - ëNous avons affaire ici à un psaume centré sur Israël en sa qualité d’assemblée de h’assidim, c’est-à-dire d’hommes d’une grande piété et de haute qualité morale. Le mot h’assid = « pieux », revient trois fois dans le psaume. L’assemblée des hassidim ne doit pas cependant être limitée à Israël ; elle peut intégrer les hassidim des nations ; le dernier verset parle en effet de « Tous ses h’assidim » ! Le nouveau cantique que cette assemblée entonnera sera le chant de la victoire finale, remportée contre les peuples tyranniques, contre leurs rois cruels qui finiront enchaînés. Les armes de la victoire seront « la louange à Dieu dans la gorge », et h’érév pifiyot « l’épée à double tranchant » (comme le suggère la traduction littérale), que nous oserons appeler « l’épée des bouches », c’est-à-dire l’arme de la parole ! (traduction encore plus littérale) . – Rabbin Claude BRAHAMI, op. cit. Une bonne partie de la différence entre Juifs et chrétiens réside dans cette ouverture du salut à tous les peuples et sur le partage universel de la victoire. Israël, peuple assurément historique et dont une partie a choisi de re-fonder à l’époque contemporaine, un Etat en temps que tel, géographique établi dans l’antique Terr promise, est aussi – pour les chrétiens, et sans doute pour tous ceux qui espèrent une autre intelligence du monde par l’actuel Etat d’Israël – l’ensemble des croyants, l’humanité-même en chemin


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