dimanche 21 décembre 2014

Moi, je serai pour lui un père, et lui sera pour moi un fils - textes du jour

Dimanche 21 Décembre 2014



Théoriquement, le début de l’hiver Le silence, sauf le ronflement de Fonzy dont je partage le canapé devant le poêle, le souffle de celui-ci et nos horloges et pendules aux sonneries décalées. Hier a été fécond, objets et radios retrouvés, transbahutage de mes cartons de livres : la collection blanche de Gallimard, les Monde réempilés, dans leur sac mensuel (FNAC, juste de la bonne contenance mais de plus en plus difficiles à trouver (plus distribués, les derniers étaient de mauvaise qualité, de même que les chèques ne sont plus acceptés, au moins sur le site vannetais) et à déplacer : ce dont j’ai débarrassé le presbytère Damgan : autant de voyages dans une dimension qui n’est ni le temps ni l’espace, mais qui est encore plus vécu, sans doute parce qu’hors sensations et sentiments que mentaux. La psychologie personnelle et collective inculquée dans la première moitié du XXème siècle, tout sauf le doute, le mur de l’Atlantique, l’enseignement de la raideur. Un motu proprio du siècle précédent : des lois pour résister au « modernisme », alors avec majuscules. Marguerite a retrouvé son entrain, Nelly CADRA a téléphoné pour prendre de ses nouvelles, la convainquant de « prendre » ses médicaments, inhalation comprise, mais c’est ma chère femme, toussant depuis deux jours qui m’inquiète, sa déprime aussi, causes multiples, inquiétudes astreignantes, la mort de ses parents en fond d’ambiance, de sa pensée je ne sais que ces obsessions sans en être sûr et que son amour dont je suis sûr. Marie n’était certainement pas une femme anxieuse, alors qu’au début de sa gestation et à cause de celle-ci, puis à la naissance de son divin fils, elle est assaillie littéralement de prédictions en tous sens : la royauté davidique, le messianisme exaucé, le glaive de douleur.
Prier… Noël arrive, cinq petites crèches comme un chœur sur le buffet aux albums de photos, prière hier soir tous trois… puisse la toux et le mal être de ma femme… Le secret de Marie, de son équilibre personnel : elle ne se pose pas nos habituels « problèmes » : orientation de vie, état de vie ce qui fut tellement ma vie, suite des événements, difficultés pratiques. Elle est entière dans le présent, elle recueille, elle voit, elle n’interroge que sur ce qui manque à sa compréhension, elle n’est ni théorique ni dans l’éventuel… Le prodigieux pour nous, ses enfants d’adoption aux côtés de son divin Fils, est que nous déduisons à l’unisson depuis des siècles et sans nous tromper, toute la psychologie d’une femme, tous ses traits de caractère et même ses réactions de très peu de textes. Mais ces textes, si sobres, sont d’une limpidité absolue, ils posent les fondations de tout, et d’abord de notre prière à son parfait exemple. Le roi David habitait enfin dans sa maison. Le Seigneur lui avait accordé la tranquillité en le délivrant de tous les ennemis qui l’entouraient. Mais il ne s’en contente pas : projet grandiose  mais logique, sanctionné d’ailleurs par son « directeur spirituel » le prophète Nathan. Loger Dieu, donner à l’arche de l’Alliance (que l’on n’a jamais retrouvée alors que l’on prétend depuis l’impératrice Hélène avoir retrouvé la Croix – elle n’est déjà plus mentionnée dans les derniers livres de l’Ancien Testament) un abri, une demeure. Et puis il y aura la tentation du soir, adultère, assassinat, mort d’un premier-né…. [1]A David, ramené à son propre sort et donc au respect de l’indépendance de Dieu vis-à-vis de tout projet humain, le Seigneur promet tout, pour lui et pour sa descendance, le bonheur et la relation. Tu reposeras auprès de tes pères je te susciterai dans ta descendance un successeur, qui naîtra de toi, et je rendrai stable sa royauté. Moi, je serai pour lui un père, et lui sera pour moi un fils. Fondamentalement, la promesse est celle de la sécurité, de la stabilité selon une relation d’exception dont cependant le meilleur de nos relations humaines est mieux que l’image ou le pressentiment : le modèle. Accomplissement que Paul présente comme le mystère essentiel, gardé depuis toujours dans le silence, mystère maintenant manifesté au moyen des écrits prophétiques… mystère porté à la connaissance de toutes les nations… comment ? l’Incarnation. C’est la partie « visible » du mystère : Dieu se laisse appréhender en entrant dans notre Histoire, dans notre chair et en vivant parmi nous, ayant pris notre nature, y compris dans sa mortalité et toutes ses limites physiques. L’Annonciation n’a pas pour objet la virginité de Marie ni même la proclamation de sa maternité d’exception. Elle est le récit, factuel, de l’Incarnation, y compris dans son mode opératoire, seule question de la Vierge : l’identité de l’ange, le but de sa visite ne la préoccupent pas, elle écoute, reçoit, elle est tellement au présent, je ne connais pas d’homme, nulle part question comme il continue d’être prêché, d’un vœu perpétuel d’abstinence, pas non plus d’interrogation sur la suite de sa vie puisqu’elle est « promise » par les siens à Joseph de la descendance de David. Non, c’est simplissime et la réponse qu’elle reçoit, la preuve qu’en sus elle entend comme une invitation au constat, sa vieille cousine enceinte de six mois ce qu’elle ne savait pas, rien de cela ne conditionnait ce qui n’est pas une réponse ou une acceptation, mais un constat, un acte de foi, le plus souverain de l’histoire de l’humanité : que tout m’advienne selon ta parole. Ce que lui apporte l’Annonciation, c’est son rôle, la consécration de son rôle, les conséquences, le rayonnement, elle en prendra conscience tandis qu’elle court chez Elisabeth, ce sera alors le Magnificat. A l’Annonciation, elle et nous, sommes dans les faits. Tu vas concevoir et enfanter un fils… la puissance du Très-Haut te prendra sous son ombre… la descendance tout humaine de David devient aussi une descendance d’une tout autre nature, d’une tout autre grandeur que celle des institutions et de l’histoire politique : il sera appelé Fils du Très-Haut, le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David son père ; il règnera pour toujours sur la maison de Jacob, et son règne n’aura pas de fin. De l’histoire à l’éternité… ta maison et ta royauté subsisteront pour toujours devant moi, ton trône sera stable pour toujours. L’Annonciation est une confirmation, la confirmation de Marie et le début de notre propre mouvement spirituel.


[1] - 2ème livre de Samuel VII 1 à 16 ; psaume LXXXIX ; Paul aux Romains XVI 25 à 27 ; Luc I 26 à 38

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