samedi 21 mars 2015

pourquoi ne l'avez-vous pas amené ? - textes du jour

Samedi 21 Mars 2015

 L’après-midi d’hier dans un Kazakhstan que je n’ai jamais connu quoique j’y vivais et étais censément informé de beaucoup de côtés. Une ambiance, subie par une famille d’origine russe et tellement harcelée, attaquée que le récit semble vécu dans l’Allemagne nazie… Incroyable au point que les autorités et juridictions françaises répondent à la demande d’asile exactement comme les autorités kazakhs aux brimades, sévices et dépôts de plaintes : tout est fabriqué ! [1]avec en plus le paradoxe que la Russie de POUTINE soutiendrait le Kazakhstan de NAZARBAEV quand il traite ainsi de ses originaires, à défaut d’être ses citoyens (la citoyenneté russe en ce moment … et les témoignages d’Ukrainiens obstinés à le demeurer et sur place en Crimée). Je vais donc me décarcasser autant du côté français que du côté kazakh. L’Etat de droit… mes « abonnements » aux réseaux de dénonciations des violences policières et procédures d’alerte et de manifestations, m’apprennent chaque jour des débordements, des morts dont on ne parle pas ailleurs…. La misère de la maladie et de la faim : soit, état du monde… mais la misère des racismes à prétexte ethnique ou religieux : état du cœur humain.
La ressource, la bonne volonté, l’accueil. Déposé une partie de la matinée d’hier les tracts du Front de gauche sur les pare-brises de voitures stationnées devant un super-marché. Toutes celles que je rencontre, déjà de l’âge, et toujours des femmes, sont souriantes et le papier n’est pas rejeté. Pas d’hommes, pas de jeunes, l’heure sans doute. Les partis dits de gouvernement ne s’affichent pas en tant que tels, ce sont des unions du centre et de… ou la majorité locale sortante et avec protestation de disponibilité, d’expérience et de proximité. Personne n’avoue l’intention de ne pas aller voter… or, les sondages prédisent entre 50 et 60% d’abstentions. – L’autre ressource, la mémoire. Dans ma chère Mauritanie, en grève de ses mineurs du fer depuis des mois, ressource décisive du pays depuis sa naissance, le pouvoir politique tout occupé à embobiner ses rivaux et les ambassades par des rumeurs de révision constitutionnelle et de dialogues, n’ayant d’embarras que le tableau d’avancement des généraux… déclare et répète ne pas se mêler du conflit : employeur/employés. La Mauritanie s’est fondée sur un pouvoir financièrement désintéressé et concerné par l’ensemble de la vie quotidienne. Le régime, celui d’un parti unique mais ouvert à tous et pêchant sans relâche les générations nouvelles, était transparent et écrit. Je l’ai pratiqué. Une de mes occupations, un de mes devoirs  de vie est de l’illustrer et de contribuer à écrire une mémoire nécessaire. Nous en sommes là en France où s’il y a toujours l’homme du 18-Juin, très scénique, il n’y a plus aucune des rigueurs et des tentatives de la Cinquième République : la démocratie directe, la participation tant aux décisions sociales qu’aux accroissements de valeurs d’actif dans les entreprises. La fin de l’impasse, et après… est pour ces mois, au plus ces courtes années-ci, et après… brouillard maintenant et ensuite. Le mur ? ou l’envol ?
Prier… chant des oiseaux… préméditation du crime… Marguerite me demande ce qu’est la passion. Je lui réponds autant par l’obsession d’amour vécue à tous âges selon nos modes de cœur, que par ce qui est subi inexorablement inhumainement atrocement. Le Christ vit les deux. Chapelet maintenant du soir, une dizaine de Je vous salue, Marie… apprendre à réfléchir ces mots et salutations priantes. Coupons l’arbre à la racine, retranchons-le de la terre des vivants, afin qu’on oublie jusqu’à son nom. Ce sont bien nos vies politiques perdues de toute fondation, c’est l’arrachement de toute compassion, de tout sentiment spontané et d’expression du cœur. Notre président incapable d’un aller-retour à Tunis, l’Europe une minute de silence pour le Bardo mais totalement obtuse pour la démonstration grecque, puis espagnole, puis portugaise… puis, certainement : française. Ne peut-on créer qu’au lendemain des catastrophes, qu’en 1945 ? et non en 2015 ? Car c’est à toi que je remets ma cause… le Christ selon les gardes venus l’arrêter : Jamais un homme n’a parlé de la sorte ! selon la hiérarchie religieuse : cherche bien, et tu verras que jamais aucun prophète ne surgit de Galilée. Le dogmatisme de nos économistes et de nos financiers de tous les adeptes de l’amnésie et de … quel serait le mot pour la non-imagination voulue, tenace et affirmée… les yeux bandés par l’existant et le présent barricadé… quant à cette foule qui ne sait rien de la Loi, ce sont des maudits. [2] Jean autant mystique que physique, l’évangéliste, le disciple que Jésus aimait, me semble le seul à insister : personne ne mit la main sur lui… Jésus se déroba et sortit du Temple…    ils voulurent l’arrêter, mais il leur échappa [3] Ces jours-ci, relire ces dialogues avec la foule et les détracteurs, intenses car les contemporains ont tous les éléments de culture et de mémoire nécessaires, autant que les dires et miracles de Celui qui les fascine : l’Ecriture ne dit-elle pas que c’est de la descendance de David et de Bethléem, le village de David, que vient le Christ ?    
  
Hier aux aurores

. . . la grâce de cette rencontre va nous revenir. Elle ne dépend pas de moi, seule et vraiment l’espérance. Rencontrer, la rencontre, le fait de rencontrer, les rencontrés ont vraiment constitué ma vie et ses mouvements, autant que ma compréhension du monde et de l’existence humaine, des modes humains doit tout aux rencontres qui m’ont été données. Longtemps, l’attente de la rencontre, la quête de toujours plus de rencontres comme épreuves heureuses de moi-même et aussi pour la disposition d’un avenir impossible, pas beau, désertique et sec à vivre seul et supposant donc celle attendue. Les libellés, les imaginations ont varié, l’attente, intense et prompte à l’emballement et à la fixation, a tendu toute ma sortie d’adolescence et m’a mobilisé bien davantage que mes études. Puis la rencontre est devenue gratuite, liaisons ou moments. Aujourd’hui que le défi n’est plus de rencontrer une femme mais de contribuer au bonheur de celle qui m’a arrêté et donner à notre fille le maximum d’étais, de provisions, de structures d’accueil pour son avenir, mon attente est diffuse, elle porte sur moi-même, remplir mes objectifs et tenir mes promesses, accomplir ce dont je me crois responsable. L’attente aussi du prince qui m’accepterait dans son intimité non pour que j’y fasse carrière et y accumule des points, ainsi que cela se vérifie chez tant de ceux qui ont « réussi » en entreprises et en politique, cette attente-là a cessé. Le prince actuel s’est refusé à ma tenace proposition. Chaque mois, semaine ou jour qui ont passé depuis le long temps de mon espérance, m’ont introduit à une sorte de mépris. Sentiment et jugement très différents de ceux que j’avais envers NS régnant. Et évidence que, même admis dans l’agenda à défaut de l’organigramme que je n’ai pas ambitionné même à l’avènement, nous n’aurions pu dialoguer, à plus forte raison travailler ensemble. Nous n’avons rien en commun intellectuellement et mentalement, je ne le soupçonnais pas il y a deux ans et jusqu’au printemps dernier (VALLS et MACRON : accentuation du reniement en esprit, sinon dans la lettre qui était confuse au PS et dans le programme présidentiel) j’espérais la conversion politique, au moins par bon sens, engendrant « forcément » d’autres manières de vivre intimement et de paraître publiquement. Car il y a la conduite en amour, sordide, et un physique qui enlaidit catastrophiquement. De profil, affreux et rebondi d’arrière-train. De face, le visage n’a plus de trait, les yeux disparaissent sous la lourdeur d’un front et de paupières inexpressifs.
Les rencontres cependant… une véritable bibliothèque de vie, des regards, des visages même sans approche ni mots… et celles qui s’organisent et se bâtissent. Ces personnages féminins pour une relation putative ce qui n’est en rien une frustration ou une limite, mais une vraie culture et appréhension de l’autre : deux qui, ces temps-ci, dans mon esprit et mon affection d’expression toute mentale, même si l’imagination peut toujours tout se permettre et effleure donc beaucoup, se complètent et balancent l’une l’autre.. Ces hommes et jeunes gens bien plus jeunes que moi que la vie m’offre en mission de les accompagner, tout le spectre du soutien scolaire à l’échange sur ce que je tente d’écrire ou sur ce que l’autre cherche à discerner comme sa voie, une véritable bifurcation. Et à l’instant, ce Mauritanien correspondant exactement à ce que je tente aussi depuis cinquante ans… face au matériau de l’histoire contemporaine d’un pays toujours en fondation, faute de continuité depuis un commencement qui avait particulièrement réussi : une approche et une collecte des faits, que je n’avais pas encore rencontrée. Hier après-midi, double rencontre, le mystère permanent et de plus en plus passionnant et attachant de ma femme : l’homme, en tout cas moi, ne sachant pas la femme tandis que celle-ci pénètre très bien le masculin, ce qui peut-être est le plus attristant de la condition féminine, n’être pas subjugué ni pris, sauf banalement, en psychologie et en physiologie. Un papier, pleine page du Monde. Les goûts et la culture de ma femme, m’apprenant depuis notre rencontre plus que bien des enseignements en beaucoup de domaines, économie, art. Souvent, ainsi, son appel à venir devant la télévision. Une enquête, tout à la gloire de la journaliste ou de la correspondante, commencée par curiosité : une annonce nécrologique rétrospective de cinquante ans. Bien mieux qu’un roman, qu’une nouvelle, le simple rendu-compte de cette enquête, les deux annonceurs : Marion van RENTERGHEIM [4], un style sobre pour une empathie rare. Nous allons lui écrire, mais ce que me donne  ma chère femme de ce qu’elle-même a d’abord apprécié, indépendamment de moi, me comble. Il est des étreintes, toutes différentes de la plus cardinale selon les apparences et les sensations, qui procurent le même ajout de connaissance de l’autre et le même assouvissement de notre nostalgie de communion avec qui nous aimons et nous attirés Rencontre aussi, ce qui s’écrit. Tandis que Marguerite cherche et trouve de nouveaux tomes de Kathy CASSIDY dont elle a vérifié sur Google que celle-ci est en âge de produire encore beau (constat aussi que l’auteur a la beauté d’une de ses héroïnes), je suis arrêté chez Leclerc-espace culturel (mais oui…) par le présentoir des martyrs de Charlie : les millions, la rente, la compilation… puis celui de la collection Poésie chez Gallimard. Et là, ouvrant le volume à sa page 260, le génie à la simple portée de qui lit une ligne : Pablo NERUDA, le secret de la correspondance entre le banal magnifié ou déchiffré, et moi qui reçoit. Retour en écho que je donne au Nobel… à ce qui fut écrit pour moi, ma chirurgienne de plateau au Franzjosefspital de Vienne, venue me visiter, je récupère à peine. Un amour physique de passion, probablement mutuel, qui ne se consomma jamais, que nous assouvîmes à ma demande et selon son consentement, en parfait et tranquille naturel : photos de nu, plusieurs nuits de suite, mais, je ne m’en étais jamais rendu compte, bien après le poème : Ton jungle… sa première venue, les yeux magnifiques, le teint changeant, les cheveux bouclés d’un « pâtre grec », le chandail rouge et moulant, le pantalon noir et son appui sur une colonne de décoration devant la fenêtre, dehors le Belvédère, dedans la vie à la naissance de notre rencontre et pour notre silence. Vérification de l’érotisme 1900, avoué par mon grand-père, rien qu’entrevoir la cheville… Revenu aussi à ce poème Mirage, dont je ne me souvenais plus du tout, en plein chagrin de plusieurs amours cumulés dans l’échec et l’impuissance de séduire ni « posséder » jamais – elle le vivant avec d’autres et moi avec une de ses cousines puis un arrangement organisé pour faire dériver et me déprendre -  une jeune fille qui ne me parut belle que des décennies ensuite, quand je la rencontrai au bras de son mari, maigrie, rayonnante, heureuse et donc manquée par moi. – Et maintenant rencontre souhaitée mais pas encore assurée ni même probable : celle d’une écriture me faisant entrer en édition et peut-être m’accomplissant comme instrument de quelque chose ? l’amas immense de tout ce que j’ai reçu à tous égards et que je veux présenter – à qui ? et pour quoi ? peut-être à l’autel de mon absence ou à l’anticipation de ma mort pour qu’elle soit message et un minimum de résidu – amas : je cherche à le composer, les rencontres avec le présent de tous mes passés se sont multipliées, toutes si chaleureuses, belles, rayonnantes, lumineuses, corps, idées, situations, entretiens d’homme à homme sur des pays, sur des tiers, sur l’existence, ce qui dure, ce qui fait instant ou produit de l’inoubliable dont la convocation, l’appel et la réminiscence sont notre bénéfice mais pas notre disposition….



[1]
- Cher Bertrand, il n’y a qu’une Cour Nationale du Droit d’Asile(CNDA). Elle est à Montreuil et traite tous les dossiers de demande d’asile qui ont été rejetés par l’OFPRA où les demandeurs d’asile passent d’abord..De 8 à 10% y obtiennent le statut de réfugié. Les autres vont à la  CNDA où l’on donne 10% de statut. C’est là qu’intervient l’avocat (dont moi)..en cas d’échec et de refus , on peut faire une nouvelle demande , avec un élément nouveau. C’est le cas de la famille ...  . Je vois un peu de tout dans ces histoires, mais, eux, je les sens « vrais »..et je voudrais tout faire pour qu’ils soient régularisés chez nous..
Merci pour tout
Olivier

[2] - Jérémie XI 18 à 20 ; psaumeVII ; évangile selon saint Jean VII 40 à 53

[3] - évangile selon saint Jean VII 30 …  44 … VIII 59  … X 39

[4] - p. 13 . Le Monde daté du jeudi 19 :  au nom de la mère. Il y a cinquante ans, Léontine Delugeard était retrouvée, « épuisée », au terme d’une vie de labeur, dans son petit logement parisien. A Noël 2014, ses enfants ont tenu, dans la page Carnet du « Monde » à lui rendre hommage

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