lundi 7 septembre 2015

bienheureuse Eugénie Picco 1867 + 1921



E
Eugenia Picco naît à Crescenzago (Milan) le 8 novembre 1867 de Joseph Picco e d'Adélaide Del Corno. Le père est un musicien de valeur à ‘La Scala’ de Milan, mais aveugle. La mère est une femme frivole, qui n'aime pas son mari, mais l'argent, le succès et les voyages. Eugénie est souvent confiée aux grands-parents. Elle ne rencontre ses parents que pendant les brèves haltes qu'ils se permettent entre les diverses tournées, jusqu'au jour que la mère rentre seule sans son mari, le donnant pour mort : Eugénie ne saura jamais plus rien de son père. A partir de là, la mère oblige sa fille à habiter avec elle et son compagnon, avec lequel elle aura, par la suite, deux fils. 

Eugénie grandit dans un milieu sans religion, moralement ruiné. Elle doit se ranger aux désirs mondains de sa mère qui la voudrait chanteuse à succès et subir le compagnon de sa mère qui la moleste et souvent l'ennuie.

« Périls et occasions à la maison et ailleurs », dira Eugénie en se souvenant de ces années tourmentées et de la force « instinctive » de prier, d'élever la pensée vers le haut, dans le silence de la basilique austère de S. Ambroise de Milan, où elle se rend chaque jour pour invoquer Dieu, sans presque le connaître. Un soir du mois de mai 1886 Eugénie sent la vocation à la sainteté. À partir de ce moment elle tendra, avec une joie et une fidélité jamais démenties, à la perfection.

À vingt ans Eugénie décide de chercher Jésus, la sainteté. Elle entre dans la Famille religieuse, encore de fondation récente, des « Piccole Figlie » des Sacrés-Cœurs de Jésus et de Marie, en fuyant de la maison le 31 août 1887. Elle est aussitôt accueillie, comprise et aimée par son fondateur, le Vénérable Agostino Chieppi.

Elle commence son noviciat le 26 août 1888, le 10 juin 1891 elle émet la première profession religieuse entre les mains du fondateur lui-même ; la profession perpétuelle suivra le 1er juin 1894. Simple et humble, fidèle et généreuse, sans réserve elle se consacre aux élèves du convict où elle enseigne la musique, le chant et le français; aux novices dont elle devient la mère et la Maîtresse; aux consœurs en servant comme archiviste, secrétaire générale et conseillère.

Au mois de juin 1911 elle est élue Supérieure générale et restera en charge jusqu'à la mort. Courageuse, elle fait vœu d'accomplir avec une perfection sereine et tranquille ses devoirs de Supérieure afin d'accomplir la volonté de Dieu. Elle fut une animatrice sage et prudente de sa Congrégation. Au cours de son gouvernement elle déploya une activité éclairée et prudente en vue d'organiser durablement son Institut en se donnant comme tâche de fixer les directives transmises par le Fondateur.

Pour tous elle est une mère, spécialement pour les pauvres, les petits, les marginaux qu'elle sert avec une charité généreuse et infatigable. Les nécessités et les drames de ses frères au cours de la Grande Guerre 1915-1918 lui ouvrent encore davantage le cœur qui se fait accueillant à toute plainte, toute douleur, toute préoccupation sociale et personnelle.

Le soutien principal, l'appui vital de sa vie intérieure et de toute œuvre et de toute action apostolique est pour sœur Eugénie l'Eucharistie, son grand amour, centre de sa piété, nourriture, réconfort et joie de ses journées remplies de prière et de fatigue.

Le Christ infuse en elle son zèle pour le salut des âmes, son désir fervent de reconduire tous les hommes à la maison du Père. La raison de son activité caritative incessante se trouve dans son ardent amour du Christ.

De faible santé, avec un corps miné par la phtisie osseuse, ce qui en 1919 conduit à l'amputation de la jambe droite inférieure, Sœur Eugénie se rend disponible à accomplir le dessein du Père. Elle est prête à toute immolation et se montre toujours l'amie souriante du Christ, des frères et du monde.
Ce dynamisme qui concentre tous ses désirs, toute la volonté en Dieu, cette résolution décidée de tendre à la perfection, traduite par une vie de mortification, de pureté, d'obéissance, d'héroïcité dans les œuvres de vertu, en vivant l'ordinaire le plus humble d'une manière extraordinaire, déterminent le climat dans lequel la vie de sœur Eugénie Picco se déroule.

Elle accomplit sa consécration totale à Dieu dans la maladie et dans la mort : le 7 septembre 1921. La réputation de sainteté se garde, et même augmentera après sa mort. Partout on entendra parler d'admiration et de vénération pour sœur Eugénie. Elle est considérée par tous comme un exemple de vertu extraordinaire et comme un modèle de piété, de zèle, de prudence, d'esprit de sacrifice et de sagesse.

Le procès de béatification fut commencé en septembre 1945. L'héroïcité des vertus fut reconnue le 18 février 1989, le 20 décembre 1999 fut publié le décret du miracle, attribué à son intercession, qui reconnaît la guérison miraculeuse de Camille Talubingi Kingombe du diocèse d'Uvira (ex-Zaire) survenue le 25 août 1992.

Eugenia Picco a été béatifiée à Rome le 07 octobre 2001, par Saint Jean-Paul II (Homelie du Saint Père), avec six autres Serviteurs de Dieu : Ignazio Maloyan, Evêque et martyr; Nikolaus Gross, père de famille et martyr; Alfonso Maria Fusco, prêtre; Tommaso Maria Fusco, prêtre; Emilie Tavernier-Gamelin, religieuse; Maria Euthymia Uffing, vierge.


Source principale : vatican.va/news (« Rév. x gpm »).

 CHAPELLE PAPALE POUR LA BÉATIFICATION DE 7 SERVITEURS DE DIEU
HOMÉLIE DU PAPE JEAN PAUL II
 
Dimanche 7 octobre 2001

1. "Le juste vivra par sa fidélité" (Ha 2, 4):  c'est avec ces paroles pleines de confiance et d'espérance que le prophète Habaquq s'adresse au peuple d'Israël à un moment particulièrement tourmenté de son existence. Relues par l'Apôtre Paul à la lumière du mystère du Christ, ces mêmes paroles sont utilisées afin d'exprimer un principe universel:  c'est à travers la foi que l'homme s'ouvre au salut qui lui vient de Dieu.

Nous avons aujourd'hui la joie de contempler ce grand mystère de salut rendu actuel avec les nouveaux bienheureux. Ce sont eux les justes qui, en raison de leur foi, vivent aux côtés de Dieu pour l'éternité:  Ignazio Maloyan, Evêque et martyr; Nikolaus Gross, père de famille et martyr; Alfonso Maria Fusco, prêtre; Tommaso Maria Fusco, prêtre; Emilie Tavernier-Gamelin, religieuse; Eugenia Picco, vierge; Maria Euthymia Uffing, vierge.

Ces frères illustres, à présent élevés à la gloire des autels, ont su traduire leur indomptable foi dans le Christ en une extraordinaire expérience d'amour envers Dieu et de service envers leur prochain.
Mgr Ignace Maloyan

2. Mgr Ignace Maloyan, mort martyr à l'âge de 46 ans, nous rappelle le combat spirituel de tout chrétien, dont la foi est exposée aux attaques du mal. C'est dans l'Eucharistie qu'il puisait, jour après jour, la force nécessaire pour accomplir avec générosité et passion son ministère de prêtre, se consacrant à la prédication, à la pastorale des sacrements et au service des plus pauvres. Tout au long de son existence, il a pleinement vécu la parole de saint Paul:  "Ce n'est pas un esprit de peur que Dieu nous a donné, mais un esprit de force, d'amour et de raison" (2 Tm 1, 14.7). Devant les dangers de la persécution, le bienheureux Ignace n'accepta aucun compromis, déclarant à ceux qui faisaient pression sur lui:  "A Dieu ne plaise que je renie Jésus mon Sauveur. Verser mon sang en faveur de ma foi est le plus vif désir de mon coeur!". Que son exemple éclaire aujourd'hui tous ceux qui veulent être de vrais témoins de l'Evangile, pour la gloire de Dieu et pour le salut de leurs frères!

Soeur Emilie Tavernier-Gamelin

3. Dans sa vie de mère de famille et de religieuse fondatrice des Soeurs de la Providence, Emilie Tavernier-Gamelin a été le modèle d'un courageux abandon à la Providence. Son attention aux personnes et aux situations la conduisit à inventer des formes nouvelles de charité. Elle avait un coeur ouvert à toute détresse, servant spécialement les pauvres et les petits, qu'elle désirait traiter comme des rois. Considérant qu'elle avait tout reçu du Seigneur, elle donnait sans compter. Tel était le secret de sa joie profonde, même dans l'adversité. Dans un esprit de totale confiance en Dieu et avec un sens aiguisé de l'obéissance, tel le "serviteur quelconque" de l'Evangile, elle accomplit son devoir d'état comme un commandement divin, voulant faire en tout la volonté du Seigneur. Que la nouvelle bienheureuse soit un modèle de contemplation et d'action pour les Soeurs de son Institut et pour les personnes qui travaillent avec elles!

Nikolaus Gross

4. Les deux nouveaux bienheureux allemands nous ramènent à une période sombre du XXème siècle. Tournons le regard vers le bienheureux Nikolaus Gross, journaliste et père de famille. Il comprit avec sagacité que l'idéologie national-socialiste ne pouvait pas s'accorder avec la foi chrétienne. Il prit courageusement la plume pour défendre la dignité des personnes. Nikolaus Gross aimait beaucoup sa femme et ses enfants. Toutefois, à aucun moment le lien qui l'unissait à sa famille ne lui fit abandonner le Christ et son Eglise. Il savait bien que "si aujourd'hui nous n'engageons pas notre vie, comment pourrons-nous ensuite prétendre nous trouver aux côtés de Dieu et de notre peuple".

C'est en raison de cette conviction qu'il fut conduit à l'échafaud, mais les portes du ciel s'ouvrirent à lui. Dans le bienheureux martyr Nikolaus Gross se réalisa ce qu'avait prédit le prophète:  "Le juste vivra par sa fidélité" (Ha 2, 4).

Soeur Euthymia Uffing

5. Soeur Euthymia a rendu un témoignage d'un tout autre genre. Cette soeur clémentine s'est consacrée au soin des malades, en particulier des prisonniers de guerre et des immigrés. Elle fut même appelée "Maman Euthymia". Après la guerre, elle dut s'occuper d'une blanchisserie au lieu de prendre soin des malades. Elle aurait certainement préféré servir les personnes plutôt que les machines. Malgré tout, elle demeura une soeur pleine de compassion, ayant un sourire amical et une bonne parole pour tous. Elle exprimait ainsi son désir:  "Le Seigneur doit m'utiliser comme un rayon de soleil qui illumine chaque jour". Elle vécut selon la devise suivante:  quoi que nous fassions, nous ne sommes toujours que "des serviteurs inutiles; nous avons fait ce que nous devions faire" (Lc 17, 10). Sa grandeur se trouve dans la foi dans les petites choses.

Dom Alfonso Maria Fusco

6. "Si vous aviez de la foi comme un grain de sénevé...", s'exclame Jésus en conversant avec ses disciples (Lc 17, 6).

Ce fut une foi ferme et authentique qui guida l'oeuvre et la vie du bienheureux dom Alfonso Maria Fusco, fondateur des Soeurs de Saint Jean-Baptiste. Dès sa jeunesse, le Seigneur avait placé dans son coeur le désir  passionné de consacrer sa vie au service des plus pauvres, en particulier des enfants et des jeunes, qu'il rencontrait en grand nombre dans sa ville natale d'Angri, en Campanie. C'est pour cette raison qu'il entreprit le chemin du sacerdoce et devint, dans un certain sens, "le Don Bosco du Sud". Dès le début, il souhaita engager dans son oeuvre plusieurs jeunes qui partageaient son idéal, en leur proposant comme devise les paroles de saint Jean Baptiste:  "Parate viam Domini", "Préparez le chemin du Seigneur" (Lc 3, 4). Confiants dans la divine Providence, le bienheureux Alfonso Maria et les Soeurs baptistines ont accompli une oeuvre bien supérieure à leurs propres attentes. D'une simple maison d'accueil est né un Institut, qui est aujourd'hui présent dans seize pays et dans quatre continents, aux côtés des "humbles" et des "derniers".

Dom Tommaso Maria Fusco

7. La singulière vitalité de la foi, attestée par l'Evangile d'aujourd'hui, apparaît également dans la vie et dans l'activité de dom Tommaso Maria Fusco, fondateur de l'Institut des Filles de la Charité du Très Précieux Sang. En vertu de la foi il sut vivre, dans le monde, la réalité du Royaume de Dieu d'une façon toute particulière. Parmi ses prières, l'une d'entre elles lui était particulièrement chère:  "Je crois en toi, mon Dieu; fais croître ma foi". Telle est précisément la requête que les Apôtres adressent à Jésus dans l'Evangile d'aujourd'hui (cf. Lc 17, 6). Le bienheureux Tommaso Maria avait en effet compris que la foi est avant tout un don, une grâce. Personne ne peut la conquérir ou la gagner tout seul. On peut seulement la demander, l'implorer d'En-haut. C'est pourquoi, illuminés par le précieux enseignement du nouveau bienheureux, ne nous lassons jamais d'invoquer le don de la foi, car "le juste vivra par sa fidélité" (Ha 2, 4).

Eugenia Picco

8. La synthèse vitale entre contemplation et action, assimilée à partir de la participation quotidienne à l'Eucharistie, fut le fondement de l'expérience spirituelle et de l'élan de charité d'Eugenia Picco. Au cours de sa vie, elle s'efforça toujours de se mettre à l'écoute de la voix du Seigneur, selon l'invitation de la liturgie dominicale d'aujourd'hui (cf. Refrain  du  Psaume responsorial), en ne se soustrayant jamais aux tâches que l'amour envers le prochain lui demandait. A Parme, elle s'occupa des personnes pauvres, répondant aux besoins des jeunes et des familles indigentes et assistant les victimes de la guerre qui, en cette période, ensanglantait l'Europe. Même face à la souffrance, avec les inévitables moments de difficulté et d'égarement que celle-ci comporte, la bienheureuse Eugenia Picco sut transformer l'expérience de la douleur en occasion de purification et de croissance intérieure. La nouvelle bienheureuse, nous apprend l'art d'écouter la voix du Seigneur, afin d'être des témoins crédibles de l'Evangile de la charité en cette première partie du millénaire.

La vocation à la sainteté

9. "Mirabilis Deus in sanctis suis!". Avec les Communautés dans lesquelles les nouveaux bienheureux ont vécu et pour lesquelles ils ont prodigué leurs meilleures énergies humaines et spirituelles, nous voulons rendre grâce à Dieu, "admirable dans ses saints". Dans le même temps, nous lui demandons, par leur intercession, de nous aider à répondre avec une ardeur renouvelée à la vocation universelle à la sainteté.
Amen!

A l'issue de la Messe de béatification, et après la prière de l'Angelus, le Saint-Père a salué les pèlerins de langue française:

Je vous salue, chers pèlerins venus de différents pays pour les béatifications de ce jour. Puissent ces nouvelles figures de sainteté, en particulier Mgr Maloyan et Soeur Emilie Gamelin, vous aider à devenir vous-mêmes des saints, dans la vie qui est la vôtre, en donnant un éloquent témoignage quotidien de votre amour pour le Christ et pour vos frères et soeurs, notamment les plus pauvres!
 


© Copyright - Libreria Editrice Vaticana
BEATA EUGENIA PICCO /

Aucun commentaire: